GÉNÉRALITÉS

Durant le premier tiers du XVIIIe siècle, les deux seigneuries mitoyennes de Couvé et de Crécy sont la propriété de Louis-Alexandre Verjus, marquis de Crécy, qui en a hérité de son père. Le château fort de Couvé domine alors la Blaise, protégeant à ses pieds de petites maisons de torchis anarchiquement construites le long de rues sinueuses.

Désirant habiter une demeure plus confortable, le marquis de Crécy abat vers 1730 l’antique château féodal, acquiert de nombreux terrains situés entre le village de Couvé et la côte de « l’Aumonette », et projette les plans d’un nouveau château, de style italien, sans toit apparent. Le site est ingrat, composé de boqueteaux descendant doucement vers la vallée de la blaise, aussi les architectes décident de construire au sommet du côteau une vaste terrasse qui permettra de recevoir le château et ses jardins et qui dominera aussi la vallée. Un mur, long de cinq cents mètres, haut de près de quatre mètres soutient la terrasse constituée de milliers de mètres-cubes de terre. L’opération, qui nécessite une main d’œuvre très importante, coûte au marquis de Crécy une fortune. L’édification de la terrasse revient à 100.000 livres. Le château, les jardins, les dépendances, la canalisation de la Blaise sur près de trois kilomètres ont bientôt raison des finances de Louis-Alexandre Verjus. Celui-ci vend son domaine en 1746 à madame de Pompadour.

La maîtresse du roi désirant imprimer sa marque personnelle à cette nouvelle acquisition, le château est agrandi et remeublé, les jardins sont redessinés. Aucune modification n’est apportée à la terrasse, mais la vallée de la Blaise est aménagée. Un long bassin est creusé au pied de la terrasse qui reçoit bientôt le nom de « miroir » puisqu’il reflète et double l’éclat des feux d’artifice. Les deux extrémités de la vallée sont fermées par de petits édifices : au nord, le château d’Aunay racheté par le roi en 1748 et au sud le moulin de la Bellassière qui, orné d’une belle façade classique, sert de buanderie durant les mois d’hiver.

On crée au pied du village de Couvé, deux nouveaux potagers, appelés « potagers d’en-bas » qui permettent, avec les « potagers d’en-haut » ou « anciens potagers », de ravitailler en fruits et légumes le personnel toujours croissant du château.

Enfin une machine hydraulique conçue par l’ingénieur Antoine Deparcieux, réalisée en 1751 [dont la maquette est conservée au musée des arts et métiers à Paris], permet de    monter l’eau de la Blaise au sommet du côteau au moyen de pompes et d’un conduit empruntant un tunnel souterrain existant encore de nos jours. L’eau récupérée dans un petit château d’eau alimente les quatre bassins des jardins du château ainsi qu’un petit canal souterrain sous les maisons du village et ravitaillant ainsi en eau courante les cuisines des ménagères.

Considérablement agrandi et embelli, le domaine de Crécy est vendu en 1757 au Duc de Penthièvre qui le cède de nouveau en 1775 au Prince de Montmorency. Sa veuve émigre en février 1791 ; ne voulant pas traverser le village le soir de son départ, les carrosses longent le bord  de la terrasse et empruntent les rampes, descendant jusqu’au miroir. Emigrée à Brunswick, la princesse ne revit plus jamais son château qui, confisqué comme bien national, est vendu à un américain, M. Parker, qui le détruisit de 1796 à 1799.

Les terrasses ont été épargnées et nous permettent aujourd’hui encore d’admirer la vallée.